Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Les limaces attaquent : au secours ! (SOS Jardin)

Il pleut, il mouille … les limaces et les escargots sont à la fête dans le jardin. Ces baveux dévorent tout, clament les jardiniers. Et il est bien vrai que la limace est l’ennemi n°1 du potager. Alors que faire contre ces baveuses ?
Les barrières de coquilles d’oeufs, les cordons de cendre de bois, les pièges à bière… bien des trucs et astuces sont donnés pour répondre à cette question. Malheureusement ils ne sont pas véritablement efficaces. Mais ne désespérez pas, des solutions pour gérer les limaces existent.
Avant de vous les donner, je trouve nécessaire de vous proposer un autre regard sur les limaces. De découvrir quelle est leur place dans l’écosystème du jardin, comment elles vivent et comment elles se nourrissent. A la guerre, il est important de connaître son ennemi. Qui sait, peut-être allez-vous découvrir que bien qu’il soit nécessaire de la réguler, la limace est aussi votre alliée.

Les barrières de cendre, de poudre de diatomées ne fonctionnent pas : l’humidité de l’air nécessaire pour les limaces quittent le sol les rends inactives. Quand aux cercle de gaillet gratteron et de coquilles d’oeufs : le mucus des gastéropodes leur permet largement de passer ces obstacles. la preuve en vidéo.


Et si les limaces étaient des auxiliaires ?

Allez, avouons-le : dans le jardin nous sommes souvent partiaux. Si les bébêtes croisées dans le potager ou les massifs ne sont pas classées comme utiles (gentilles coccinelles dévoreuses de pucerons, sympathiques pollinisateurs, jolis papillons…) elles sont louches, suspectes. De là à être nuisibles, il n’y a qu’un pas.
Et pourtant tout peut changer. Si l’on cesse d’être dans le jugement pour observer quelle place prend chaque bestiole dans son écosystème. Une approche très « permaculturelle ». Tentons-le avec la terrible, l’atroce, l’horrible limace.

Miam, des champignons ! Vous aimez les cèpes et les morilles : la limace aussi ! Elle mange principalement (à plus de 98%)… des champignons. Tous les champignons ! Les lactaires et autres amanites qui poussent dans les sous-bois bien sur. Mais aussi les champignons à l’œuvre dans la décomposition de la matière organique, ceux qui dégradent la litière posée sur le sol : paillis, feuilles abîmées, déchets du compost…

La limace a un sens olfactif développé. Mais elle ne possède pas notre odorat. Grâce aux deux tentacules qui se trouvent autour de leur bouche, elle capte les substances volatils qu’émettent les plantes lorsqu’elles sont attaquées par des champignons, qu’elles sont stressées. Ces signaux n’ont aucun parfum perceptible pour notre nez humain. C’est pourquoi l’ail, la tanaisie et autres végétaux à forte odeur n’ont aucune action répulsive sur les limaces. Malheureusement. Rien ne détournent ces gastéropodes de leur source de nourriture.

Les limaces aiment aussi les champignons pathogènes, ceux qui attaquent les plantes. Elles dévorent ainsi le botrytis, l’oïdium, septoriose, cladosporiose et autres oïdiums. Ainsi elles attaquent les feuilles abîmées des pourtours des salades mais pas les belles pommes fraîches. Vous verrez des limaces sur des fraises qui sont trop mûres et/ou qui ont été blessées par des oiseaux, des rongeurs, d’autres animaux et sur lesquelles se développent des champignons … mais pas sur des fraises saines.

Les limaces vont ingérer ces champignons et leurs spores. Elles les digèrent. Elles limitent donc la prolifération et la dispersion des maladies

On pense que les limaces mangent les fraises. Mais elles viennent gouter les champignons qui se développent sur les fraises blessées ou trop mûres. Elles jouent simplement leur rôle d’éboueur.

Les limaces recherchent aussi les champignons souterrains, ceux qui font la vie du sol.
Attention : scoop ! Après son repas si la limace digère parfaitement les spores des champignons pathogènes elle évacue ceux des champignons bénéfiques. Mieux que cela : elle les excrète en les enveloppant d’un mucus qui favorise leur germination. Elle les transporte sur son corps et sème ainsi les spores au gré de ses pérégrinations. Les scientifiques estiment que la limace est à la vie du sol ce que l’abeille est à la fécondation des fleurs.

Régulatrice de maladie, nourrice du sol, éboueur… je vous ai présenté la limace comme un auxiliaire, une alliée du jardinier. Mais elle s’acharne au printemps à dévorer de nombreuses plantes. C’est que la limace a malheureusement un terrible vilain défaut. Qui n’est pas de sa faute.
Il lui manque une enzyme digestive et celle-ci se trouve dans certains jeunes tissus végétaux. Quand les plantes vieillissent, se lignifient, elles perdent cette substance et elles n’intéressent plus du tout les gastéropodes. Vous l’avez certainement observé : les limaces attaquent les graines qui germent, les plantules, les toutes jeunes feuilles… mais pas les plants adultes, ligneux.

Bon on fait comment alors avec les limaces ?

Trêve d’empathie “limaçonne”, je reprend ma casquette de jardinière. Que faire pour profiter de nos gluantes auxiliaires sans danger pour nos plantations ? Voilà une stratégie de lutte en 3 étapes

« Les limaces dévastent mon potager ! ». “Elles dévorent tout“. Je ne vous dirais pas le contraire. Mais nuançons toutefois.

Ces gastéropodes n’attaquent pas le jardin durant toute la belle saison. Composées à 80% d’eau, les limaces sont très sensibles à la sécheresse et à la chaleur. Elles passent 90 à 95% de leur temps dans le sol, ne s’aventurant en surface que lorsque l’air est assez humide. Le plus souvent la nuit. En dehors du printemps et de la fin de l’été (parfois), ces souterraines et noctambules se font discrètes voire invisibles.

Par ailleurs, je le rappelle, les limaces ne dévorent pas toutes les plantes. Elles ne s’attaquent en fait qu’à deux types de végétaux : les jeunes plants et les plantes flétries, moribondes, en décomposition. Ce qui m’amène à la deuxième étape :

Vous aurez peut-être du mal à le croire mais si les limaces ont toujours été l’ennemi juré des jardiniers, elles n’ont jamais fait autant de dégâts que ces dernières années… depuis que l’on applique de grosses couches de paille ou autre matériaux ligneux (Miscanthus, BRF…).
Comment l’expliquer ? La paille est très riche en carbone. Il lui faut beaucoup de temps pour se décomposer. Elle capte l’eau qu’elle utilise pour cela. Sous une couche de paille, le sol est frais, l’atmosphère est humide. Des conditions parfaites pour la limace. Elle trouve là non seulement les champignons à l’oeuvre dans la décomposition de la paille mais aussi un abri idéal qui les protège de leurs prédateurs. La paille est le Bed &Breakfast des limaces, une auberge offrant gîte et couverts.

La paille peut facilement être remplacée par des couches minces de…ce que l’on a sous la main : tontes de gazon, feuilles, herbes arrachées…
Mieux : remplaçons le paillage par une couverture du sol vivante. Telle est l’étape suivante.

Les dégâts des limaces s’observent sur les jeunes plants, les semis, les pousses, ce que j’appelle de la verdure. Au printemps, lorsque les limaces sortent de leur repos hivernal, le jardin (et le potager en particulier) n’en contient que peu. Pas étonnant que les limaces s’y attaquent. Au contraire, plus le potager printanier est rempli, plus les dégâts des gastéropodes se répartissent. Ils sont donc moins visibles.
Je cultive donc de la verdure pour les limaces, en privilégiant les familles de plantes qu’elles préfèrent. Quelques exemples :

  • Je sème de la moutarde en engrais vert. Comme cela je couvre le sol dans l’attente de mes futures cultures
  • J’installe une ligne de laitue à couper (‘Cressonnette du Maroc’, ‘Feuille de Chêne’…). Je sème dru ces salades qui ne font pas de pommes. Comme à chaque coupe (au collet) les plants émettent de nouvelles feuilles, nous avons largement de quoi nous satisfaire les limaces et moi !
  • Dans le même ordre d’idée, je sème assez dru une ligne de choux (De Bruxelles, de Milan…). Les plants rescapés seront plantés ailleurs.
  • Dès que je le peux je sème autour de mes plants (de tomates, de choux, de céleri….) un mélange de roquette, de pourpier, cerfeuil, cresson alénois. Ce sont des verdures qui poussent très rapidement.
Les canards Coureur Indien apprécient les limaces, c’est vrai. Mais ils aiment aussi les salades, les choux, les bettes… Ils se couchent sur les plantes, les écrasent sous leurs pattes palmées. Ce faisant ils font plus de dégâts au potager que les limaces. Et n’oublions pas qu’il faut leur donner un abri contre leurs prédateurs et une vraie alimentation, les limaces et autres insectes n’étant qu’accessoire pour eux.

A propos des granulés anti-limaces…

On a tendance à les rejeter d’emblée. La faute en revient aux anti-limaces d’autrefois qui étaient à base de métaldéhyde. Cette molécule chimique empoisonnait non seulement les gastéropodes mais aussi les prédateurs de ces derniers : hérissons, crapauds… Pire : ils s’avéraient toxique pour les animaux domestiques.

Mais en 2019 la loi Labbé interdit la commercialisation des produits issus de la chimie de synthèse auprès des jardiniers. Terminés les granulés à base de métaldéhyde. Vous ne trouverez plus commercialisés que des anti-limaces à base de fer, issu du recyclage de ce dernier. Le mode d’action est complétement différent des anciens granulés.

Les granulés à base de phosphate ferrique attirent irrésistiblement les limaces et les escargots. Plus encore que les jeunes plants et les graines qui germent. Ils ne les empoisonnent pas mais vont bloquer la digestion des gastéropodes. Les limaces s’enterrent alors dans le sol où elles meurent de faim. Si un oiseau, un carabe ou un autre prédateur dévorait par hasard une limace moribonde… il ne lui arriverait rien puisqu’elle n’est pas empoisonnée et que le phosphate de fer est sélectif. Il n’agit que sur la digestion des seuls gastéropodes.

La pluie (ou la rosée) fait déliter ces granulés. Dans le sol ils libèrent des ions. Ceux-ci sont alors pris en charge par des bactéries spécifiques qui les rends assimilables par les plantes. Cette forme de fer est un oligo-élément des végétaux.

Ces granulés n’ont donc aucun impact sur les lombrics ou la vie du sol. Comme les médicaments, les produits de soin du jardin font l’objet de tests d’efficacité et de toxicologie. C’est indispensable pour pouvoir bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché. Et plus particulièrement pour les produits qui sont destinés aux jardins, à l’usage amateur. Une banque de donnée officielle (ephy) permet de vérifier toutes ces données. On peut ainsi voir que le phosphate ferrique n’affecte ni la faune, ni les organismes aquatiques, ni la vie du sol.

Sans excès bien sur

Tout est poison, rien n’est poison, c’est la dose qui fait le poison” affirmait Paracelse. Inutile donc de mettre des granulés anti-limaces beaucoup, partout et tout le temps. Quelques granulés autour des plants très attractifs pour les limaces (laitue, courges, concombre et autres Cucurbitacées) suffisent.

Pour aller plus loin, quelques sources



Dans la série SOS Jardin : les fourmis (et les pucerons) c’est grave ?


La boutique de la Jardinerie

Abonnez-vous
à notre newsletter

Autres actualités

à ne pas manquer